Ménopause au travail : "le sujet est un peu moins tabou"

Directeur de l’innovation et de la transformation RH au sein du groupe Les Echos - Le Parisien, Aymeric Vincent pilote plusieurs missions : data et systèmes décisionnels (paie, data, SIRH etc), engagement (formations collectives, conférence d’engagement, marque employeur et communication interne), compétences (formations individuelles, recrutement digital, recrutements et relations écoles) et santé-social (médecine du travail, infirmière et assistante sociale).

En avril dernier, il surprend les salariés en organisant une conférence en ligne sur les conséquences de la ménopause au travail.

Une conférence en ligne sur les effets de la ménopause au travail

"J’ai une curiosité pour tout ce qui se passe dans la société ; or, le sujet de la ménopause au travail a commencé à émerger, notamment dans le monde de l'édition [dont il est issu puisqu'il a travaillé au sein des RH d'Editis de 2006 à 2018]. Plusieurs articles ont même été récemment publiés sur le sujet (Elle, Madame Figaro), constate-t-il. La lecture de l'ouvrage de Cécile Charlap, maîtresse de conférences à l’Université Toulouse Jean Jaurès, docteure en sociologie, "La fabrique de la ménopause" (*) le "captive" avec son approche non pas médicale mais sociologique du phénomène (la "ménopause sociale"). Par ailleurs, il est amené à côtoyer dans son équipe une collaboratrice de 26 ans "très libre sur ces sujets en raison de l'effet générationnel".

Aymeric Vincent insiste : "ce n’est pas venu d’une demande en interne" mais bien de la conjonction de ces éléments qui ont suscité sa curiosité. Après avoir obtenu le feu vert de la direction, il lance l'invitation par mail, qui suscite déjà des débats "à tous les étages". L'organisation de la conférence donne lieu à plusieurs types de réactions. "Certains estimaient que c'était bien d’organiser cette conférence ; d'autres craignaient de s'y inscrire car alors cela voulait dire qu'elles étaient concernées par le sujet. Enfin, certaines personnes estimaient que parler de ce sujet revenait à les stigmatiser". Pourtant, estime Aymeric Vincent, "aborder le sujet de la ménopause au travail est moins intrusif que d’attaquer le sujet sous l’angle médical. Je me suis dit que cela permettrait de ne pas trop heurter les uns et les autres".

Donner des clefs de compréhension aux salariés et aux managers

La conférence, qui a lieu en distanciel le 5 avril dernier, attire près de 80 salariés dont une grande majorité de femmes, qui composent d'ailleurs la majeure partie de l'effectif dans le groupe avec une moyenne d’âge de 44 ans. L'occasion pour Aymeric Vincent de constater "le niveau de méconnaissance du sujet tant chez les hommes que chez les femmes. Or, cela a des conséquences au quotidien surtout pour les femmes" [la conférence abordait aussi la question de l’andropause]. "La sociologue était très didactique et non dans une position engagée. Elle intervient peu aujourd’hui dans les entreprises, mais plutôt au sein des universités et dans le secteur de l’assurance médicale", explique-t-il. L’infirmière de santé au travail est intervenue à la fin de conférence pour faire un point médical.

"L'objectif de cette conférence était d'ouvrir le débat et de donner des clefs de compréhension aux salariés et aux managers. Il s'agit de comprendre la situation : connaître les bouffées de chaleur, ne pas en plaisanter". S'agissant des conséquences de la ménopause au travail, Aymeric Vincent estime que la souplesse donnée par l'accord sur le télétravail au sein du groupe permet déjà de gérer ces situations.

Aborder ces sujets au sein de l'entreprise enthousiasme Aymeric Vincent. "C'est passionnant pour l’évolution de la fonction RH. Tous ces sujets posent la question de la place de l’intime en entreprise et des frontière à tracer". Il en est sûr, "le futur de la fonction RH est sur les questions sociétales".

(*) Cécile Charlap, "La fabrique de la ménopause". CNRS Editions.