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17 octobre 2023

Pour rappel, le principe du « droit à la preuve », tiré des articles 6 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme (droit à un procès équitable et droit au respect de la vie privée et familiale) et consacré par la jurisprudence de la CEDH (CEDH, 10 oct. 2006, L.L. c/ France, n° 7508/02), consiste à accepter la production d’un mode de preuve a priori non admissible en mettant en balance les intérêts que le secret protège et les autres intérêts en jeu, c’est-à-dire dès lors qu’une telle atteinte à la vie privée est proportionnée au regard des intérêts antinomiques en présence. 

La Chambre sociale de la Cour de cassation a fait, pour la première fois en 2020 en matière de réseaux sociaux, application de ce principe (Cass. soc., 30 sept. 2020, n° 19-12.058).

Dans deux arrêts du 4 octobre 2023, elle a l'occasion de confirmer sa position.

Dans ces affaires, deux infirmières avaient été licenciées pour faute grave. Il leur était reproché, entre autres, d’avoir participé à une séance photo en maillot de bain sur leur lieu de travail et pendant leurs horaires de travail. Ces faits avaient été révélés par une aide-soignante appartenant au même groupe privé « Messenger » que la salariée et sur lequel avait été postées les photographies. 

Remarque

l'aide-soignante attestait que lors de soirées arrosées, les infirmières s'étaient prises en photographie en maillot de bain dans le service des urgences, photographies partagées sur groupe Messenger auquel elle appartenait.

Les salariées contestent leur licenciement reposant, selon elles, sur des photos privées issues d'une messagerie instantanée dont elles n'avaient pas autorisé la diffusion. Elles estiment que la production de cette preuve portant atteinte à leur vie privée n'est pas indispensable à l'exercice du droit à la preuve de leur employeur et n'est pas proportionné au but poursuivi.

La cour d'appel reçoit toutefois ces éléments de preuve.

Les salariées se pourvoient alors en cassation. Leur pourvoi est rejeté. 

La Cour de cassation rappelle que l’illicéité d’un moyen de preuve n’entraîne pas nécessairement son rejet des débats, le juge devant, lorsque cela lui est demandé, apprécier si l’utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle d’un salarié à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi, en l'espèce la défense de l'intérêt légitime de l'employeur à la protection des patients, confiés aux soins des infirmières employées dans son établissement. 

C'était bel et bien le cas dans ces affaires. Ces photographies ont donc pu légitimement être produites aux débats et révèlent un comportement contraire aux obligations professionnelles des salariées.

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