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4 octobre 2022
L'employeur qui conclut à l'impossibilité de mettre en place le télétravail préconisé par le médecin du travail pour le reclassement d'un salarié inapte doit être en mesure de justifier avoir sérieusement tenté de le mettre en place ou s'être trouvé dans l'impossibilité technique de le faire. A défaut, le licenciement du salarié pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
L'employeur doit justifier de l'impossibilité de reclasser en télétravail un salarié inapte
©Gettyimages

Les préconisations du médecin du travail s'imposent à l'employeur

Lorsqu’un salarié est déclaré inapte à son poste par le médecin du travail, l’employeur doit chercher à le reclasser dans un autre emploi adapté à ses capacités, conformément aux dispositions du Code du travail. L’article L 1226-2, alinéa 3 impose notamment à l’employeur de tenir compte, dans sa recherche, des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. 

Les préconisations du médecin du travail s’imposent en effet à l’employeur, qui ne peut pas passer outre (Cass. soc. 23-9-2009 n° 08-42.629 F-PB ). Si l’employeur conclut à l’impossibilité de reclasser le salarié sur un tel poste, il indique à ce dernier, par écrit, les motifs s’opposant à son reclassement avant d’engager la procédure de licenciement (C. trav. art. L 1226-2-1, al. 1).

En cas de litige, la preuve de l'impossibilité de reclassement pèse sur l'employeur

La Cour de cassation en déduit qu’en cas de litige, la charge de la preuve que les préconisations du médecin du travail ont été respectées pèse sur l’employeur (Cass. soc. 14-10-2009 n° 08-42.878 FS-PBR ; Cass. soc. 23-11-2016 n° 15-18.887 F-D). Ce principe est rappelé, en l’espèce, par la cour d’appel de Paris dans une affaire opposant un employeur et une salariée déclarée inapte à son poste, sauf télétravail à son domicile.

L’employeur avait conclu à l’impossibilité de mettre en place le télétravail, ce mode d’organisation n’étant, selon lui, pas compatible avec son emploi de vendeuse à distance qui impliquait la préparation de commandes depuis le lieu de travail. Pour décider que l’employeur a manqué à son obligation de reclassement, les juges se sont appuyés sur plusieurs éléments. En premier lieu, ils ont relevé que le médecin du travail n’avait pas préconisé le télétravail d’emblée, mais ne s’était prononcé qu’après avoir effectué l’étude du poste de la salariée prévue par l’article L 4624-4 du Code du travail. En outre, la salariée soutenait que le système informatique de l'entreprise et le type de poste s'y prêtaient. Elle produisait, à l’appui de ses affirmations, des extraits de presse justifiant de la taille de l’entreprise, de son champ d’action géographique et mentionnant que de nombreuses commandes étaient gérées à distance.

Les juges relèvent qu‘en revanche, l’employeur n’a produit aucune pièce de nature à justifier de l’impossibilité de mettre en place le télétravail, et s’est contenté de procéder par affirmation. Il aurait dû justifier avoir sérieusement cherché à mettre en place le télétravail - par exemple en s'entretenant avec le supérieur hiérarchique de la salariée pour l'interroger sur la faisabilité d'une telle organisation - ou prouver être dans l'impossibilité technique de le faire - par exemple en sollicitant l'expertise de son service informatique.

L’impossibilité de reclasser la salariée n’étant pas démontrée, les juges en ont déduit que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Documents et liens associés

CA Paris 18-5-2022 n° 19/02933, Sté Pharmacie du Four Bonaparte c/ X.

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Laurence MECHIN
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