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3 mars 2023
Le transfert d'une entité économique autonome ne s'opère que si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement, par un nouvel exploitant. Illustration de ce principe au changement de prestataires chargés de l'entretien d'un marché.

L'article L. 1224-1 du code du travail régit le sort des contrats de travail lors d'un transfert d'entreprise : il dispose que lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.

Pour l'application de ce principe, la jurisprudence entend par transfert d'entreprise, comme le transfert d'une entité économique autonome définie comme un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre (Cass. soc., 7 juill. 1998, n° 96-21.451 ; Cass. soc. 27 févr. 2013, n° 12-12.305 ; Cass. soc. 23 juin 2021, n° 18-24.597).

Remarque

cette définition est inspirée de celle donnée par la directive communautaire du 12 mars 2001 relative au transfert d'entreprise. En effet, la directive entend entité économique comme un ensemble organisé de moyens, en vue de la poursuite d'une activité économique, que celle-ci soit essentielle ou accessoire.

En l'espèce, une commune a attribué la gestion des droits de la halle d'un marché à une société entrante, dans le cadre d'une délégation de service public. Auparavant, cette délégation de service public était attribuée à une autre société. Un salarié, travaillant pour le compte de la société d'origine, a été informé par cette même société que son contrat de travail était transféré à la nouvelle société entrante mais celle-ci a refusé de reprendre son contrat de travail. Il a donc saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire aux torts de la société d'origine.

L'enjeu est de savoir s'il y avait transfert du contrat de travail du salarié dans le cadre du changement de prestataire chargé de l’entretien de cette halle du marché afin de savoir si la demande de résiliation judiciaire aux torts de l’entreprise d’origine est fondée.

Remarque

si l’article L. 1224-1 ne s’applique pas, il n’y a pas de transfert automatique des contrats de travail et les salariés qui ne sont pas maintenus dans l’entreprise d’origine peuvent demander la résiliation judiciaire de leur contrat aux torts de l’employeur.

Pour la cour d'appel, le contrat de travail du salarié n'avait pas été transféré à la nouvelle société entrante au motif que cette société avait son propre matériel et que dans la société d'origine, un salarié essentiel pour l'activité avait conservé son poste. La société d'origine conteste et estime que la nouvelle société entrante a repris les locaux (en l'espèce, la halle de marché), ainsi que la clientèle du marché.

La Cour de cassation confirme la décision de la cour d'appel. Elle rappelle au préalable les règles d’application de l’article L. 1224-1 du code du travail : cet article « s’applique en cas de transfert d'une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise. Constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre. Le transfert d'une telle entité ne s'opère que si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement, par un nouvel exploitant ».

Appliquant ces règles au cas d’espèce, elle en déduit qu’il n’y a pas eu transfert d'une entité économique autonome ayant conservé son identité en relevant trois points constatés par les juges du fond :

  • la société entrante produisait les éléments communiqués pour sa candidature à l'offre de marché comprenant la liste de ses moyens matériels propres et de son personnel attaché à ces tâches ;
  • il n'y avait eu aucun transfert de matériel ;
  • la société d’origine avait conservé en poste le régisseur placier dont le rôle est essentiel sur un marché.

En conséquence, le salarié est en droit de demander la résiliation judiciaire de son contrat aux torts de l’entreprise d’origine qui est restée son employeur.

Cette solution s'inscrit dans la jurisprudence constante de la Cour de cassation selon laquelle le simple changement de prestataire ne suffit pas à appliquer l'article L. 1224-1. Le fait que la même activité se poursuive avec un autre employeur n'a pas pour effet d'entraîner le transfert des contrats de travail, sauf si cette activité constitue une entité économique autonome (Cass. ass. plén., 15 nov. 1985, n° 82-40.301).

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Lucie ONETO
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