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5 juillet 2022
Un accord de report du terme du délai de consultation du CSE exclut l'application des délais réglementaires fixés, à défaut d'accord par l'article R. 2312-6 du code du travail. Le vote d'une expertise à l'échéance de ce délai ne permet donc pas de porter le délai de consultation à deux mois rétroactivement.

Le délai de consultation du CSE est fixé par un accord collectif, ou en l'absence de délégué syndical, par un accord entre l'employeur et le CSE adopté à la majorité des titulaires, ou à défaut d'accord par les délais réglementaires fixés aux articles R. 2312-5 et R. 2312-6 du code du travail (C. trav., art. L. 2312-16).

La jurisprudence a assoupli les règles en permettant l'adoption d'un accord de prolongation des délais de consultation « d'un commun accord » avec les membres du CSE (Cass. soc., 8 juill. 2020, n° 19-10.987). Mais qu'en est-il de l'articulation entre un tel délai prolongé et les délais réglementaires de consultation, dans le cas de la désignation d'un expert à l'échéance dudit délai ?

C'est à cette question que répond l'arrêt publié de la Cour de cassation du 29 juin 2022, pour la première fois à notre connaissance.

Consultation sur la politique sociale reportée d'un commun accord

Dans cette affaire, une entreprise enclenche sa consultation sur la politique sociale en transmettant à son CSE plusieurs documents (bilan de la formation, bilan sur l'emploi des travailleurs handicapés, rapport sur l'égalité professionnelle, bilan social...) lors d'une première réunion se déroulant le 30 septembre 2020.

Il n'y a aucun accord relatif aux délais de consultation.

Le 30 octobre 2019, une nouvelle réunion a lieu mais l'avis du comité sur la politique sociale ne peut être recueilli, faute de temps pour aborder ce point de l'ordre du jour. Une nouvelle réunion est alors convoquée le 2 novembre 2020, et se tient le 12 novembre.

Lors de cette réunion, le CSE décide de recourir à un expert dans le cadre de cette consultation.

L'employeur conteste cette délibération, au motif que le délai de consultation ayant été fixé conjointement au 12 novembre, le CSE était réputé avoir rendu son avis ce jour, et ne pouvait rétroactivement rendre le délai réglementaire de 2 mois applicable sans accord.

Mais le tribunal donne raison au CSE, estimant que « la décision du CSE de recourir à un expert prise le 12 novembre 2020, soit le dernier jour du délai préfix de consultation fixé par accord, la durée de consultation a été portée à deux mois avec effet rétroactif à compter du point de départ ».

Prééminence de l'accord relatif au délai de consultation sur les délais réglementaires

Mais la Cour de cassation est de l'avis de l'employeur.

Après avoir rappelé les textes applicables en matière de délai de consultation, la Cour en conclut que « les dispositions de l'article R. 2312-6  (délais de consultation réglementaires) n'ont vocation à s'appliquer qu'en l'absence d'accord collectif de droit commun ou d'un accord entre le comité social et économique et l'employeur fixant d'autres délais que ceux prévus à cet article ».

Puis la chambre sociale explique que :

  • d'une part, les informations communiquées ou mises à disposition du comité le 30 septembre 2020 ont marqué le point de départ de la consultation et ;
  • d'autre part, l'employeur et le CSE étaient convenus par un commun accord de reporter le terme du délai de consultation au 12 novembre 2020.

Il s'en déduit « que cet accord excluait l'application des délais réglementaires fixés, à défaut d'accord, par l'article R. 2312-6 du code du travail et qu'au jour où il statuait, le délai étant échu, le comité était réputé avoir émis un avis négatif de sorte que l'expertise ne pouvait qu'être annulée ».

En d’autres termes, l'accord de report du délai de consultation entre l'employeur et le CSE s'applique, ce qui exclut l'application des délais réglementaires. Ainsi, seul un autre accord peut dorénavant reporter ce délai de consultation, la désignation d'un expert ne pouvant permettre d'exiger l'extension du délai de consultation selon les dispositions réglementaires devenues inapplicables par l'effet de l'accord.

NDLR

si cette décision peut paraître sévère dans cette affaire (prorogation du délai « d'un commun accord »), il s'agit toutefois d'une rencontre de volontés et donc d'un accord. La décision constitue ainsi une application logique du principe de parallélisme des formes, exigeant qu'un acte pris selon une certaine procédure, ne puisse être modifié qu'en suivant une procédure identique. Il convient en conséquence d'être prudent en cas de signature d'un accord, mais également lorsque membres du CSE et employeur s'accordent, sans formalisation écrite particulière sur le report du recueil d'un avis. Ce délai devient alors le seul applicable. Il ne peut être modifié que selon les mêmes modalités, et donc uniquement par accord entre les parties prenantes. Il convient donc d'être précis sur les termes de cet accord (le PV de la réunion pouvant faire foi), et de prévoir la possibilité de la désignation d'un expert et d'une prolongation corrélative du délai le cas échéant.

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