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1 avril 2022
L'obligation patronale relative à la prévoyance des cadres est satisfaite si ses contributions atteignent 1,5 % du PSS, compte tenu du financement patronal au régime frais de santé d'entreprise.

Prévoyance obligatoire des cadres : que dit précisément la CCN de 1947 et l'ANI de 2017 qui s'y est substituée ?

La convention collective du 14 mars 1947 de retraite et de prévoyance des cadres (art. 7) obligeait les employeurs à s'acquitter, au bénéfice de leur personnel cadre et assimilé (art. 4 et 4 bis), d'une cotisation minimale égale à 1,5 % de la tranche A du salaire (partie de salaire limitée au plafond de la Sécurité sociale - PSS).

Cette convention collective n'est plus applicable depuis le 1er janvier 2019 à la suite de la fusion Agirc-Arrco issue des accords nationaux interprofessionnels (Ani) du 30 octobre 2015 et du 17 novembre 2017. Mais un Ani du 17 novembre 2017 spécifique à la prévoyance des cadres a été conclu pour maintenir le dispositif issu de l'article 7 de la convention collective du 14 mars 1947. L'employeur reste donc tenu, après le 31 décembre 2018, de verser la cotisation de 1,50 % sur la tranche de rémunération en deçà du plafond de la Sécurité sociale.

Remarque : à défaut, en cas de décès d'un salarié, l'employeur est redevable, vis-à-vis de ses ayants droit, d'un capital minimum égal à trois plafonds annuels de la Sécurité sociale.

Cette cotisation est affectée « par priorité » à la couverture décès : à cet égard, l'affectation par priorité signifie que plus de la moitié (0,75 %) de cette cotisation obligatoire doit être consacrée au financement de la garantie décès des cadres, le surplus pouvant être affecté à d'autres avantages de prévoyance tels que le risque invalidité.

Prise en compte de la couverture frais de santé : une décision d'appel confirmée par la Cour de cassation

Pour vérifier le respect de cette obligation, doit-on prendre en compte la contribution patronale finançant la couverture des frais de santé ?

C’est à cette question qu’avait répondu la cour d’appel de Paris en 2020.

Le syndicat à l’origine du litige soutenait, entre autres, que depuis 2013, législateur et partenaires sociaux distinguaient explicitement « frais de santé » et « prévoyance lourde », ce qui plaidait en faveur d’une exclusion de la contribution patronale finançant un régime frais de santé.

Mais pour la cour d’appel de Paris, cette contribution devait être prise en compte pour déterminer si les cotisations « prévoyance » à la charge de l’employeur atteignaient ou non le taux de 1,5 % sur la partie de salaire limitée au PSS. Cette obligation était satisfaite si plus de 0,75 % de ces cotisations étaient dédiées au financement d’une garantie décès (CA Paris, 6 févr. 2020, n° 18/20112). Tel était bien le cas en l’espèce puisque l’employeur cotisait à hauteur de 2,8 % sur cette tranche, avec 1 % consacré aux risques dits « lourds » et 1,18 % pour les frais de santé.

Une décision confirmée par la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 30 mars 2022 (second moyen). « Ni la CCN de 1947 ni l’ANI qui la substituait n’excluaient les frais de santé des avantages de prévoyance financés par l’employeur, seule étant prévue une affectation prioritaire de la cotisation à la couverture décès » ; la cotisation patronale versée pour le financement de la garantie frais de santé doit donc être retenue pour vérifier le respect de l’obligation de l’employeur de cotiser en matière de prévoyance à hauteur de 1,50 % de la tranche de rémunération inférieure au PSS.

Portée pratique de l'arrêt : une prise en compte à manier avec prudence

En pratique, l’entreprise souhaitant s’appuyer sur cette décision pour optimiser le poids du financement de ses régimes de prévoyance doit se montrer très prudente pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, la faculté d'exercice des dispenses d'affiliation, au sein des régimes frais de santé, tempère la portée pratique de cet arrêt. En effet, si un cadre bénéficie d’une dispense d’adhésion (de droit ou facultative) au régime « frais de santé » obligatoire mis en place dans son entreprise, celle-ci risque de ne plus respecter son obligation et peut alors, en cas de décès du cadre, se voir condamnée au versement d’un capital de 3 PASS aux ayants-droit du défunt (soit 123 408 euros en 2022).

Ensuite, contrairement à la prévoyance lourde, les cotisations finançant les régime frais de santé sont souvent calculées sur une assiette forfaitaire. Pour vérifier si, pour chaque cadre, le cumul des financements patronaux santé et prévoyance atteint bien 1,50 % du salaire plafonné, l'employeur doit alors tout convertir en valeur absolue, sans oublier d'isoler la fraction patronale consacrée à l'éventuelle couverture obligatoire des ayants droit. De savants calculs à faire, sources d'erreurs.

Le jeu en vaut-il vraiment la chandelle ?

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