Droit fondamental à valeur constitutionnelle reconnu à tout salarié, le droit de grève est particulièrement protégé par le code du travail. Lorsqu'un mouvement collectif se déclenche, l’employeur ne peut licencier un salarié gréviste qu’en cas de faute lourde. À défaut, le licenciement prononcé encourt la nullité (C. trav., art. L. 2511-1). Soucieuse de préserver ce droit, la jurisprudence entend largement la protection du salarié gréviste. Ainsi la nullité du licenciement prévue s’étend à tout licenciement prononcé à raison d’un fait commis au cours ou à l’occasion de l’exercice d’un droit de grève et qui ne peut être qualifié de faute lourde.
Remarque
pour rappel, tenter d'inciter les membres de son équipe à mener une action de grève correspond à l'exercice du droit de grève et ne peut être assimilé à une faute lourde pouvant justifier un licenciement (Cass. soc., 23 nov. 2022, n° 21-19.722 ; Cass. soc., 1er juin 2023,n° 22-13.304).
L’arrêt du 14 novembre 2024 rendu par la Cour de cassation apporte une nouvelle illustration.
Des menaces de grève proférées lors d'un conflit collectif
Dans le cadre d’un conflit opposant les salariés d’un atelier à leur direction, relatif à la mise à leur disposition d’un véhicule de service, un des salariés est licencié pour faute grave. En cause, il avait annoncé à son employeur l’intention des salariés de faire grève et de mettre à l’arrêt l’atelier si un véhicule n’était pas présent sur le site le lendemain. Il saisit la juridiction prud’homale pour contester son licenciement en invoquant la nullité et obtient la condamnation de l’employeur. Ce dernier se pourvoit en cassation.
Selon l'employeur, le licenciement prononcé n’est pas intervenu à l’occasion de l’exercice du droit de grève et ne peut être sanctionné par la nullité. Les dispositions protectrices accordées aux salariés grévistes ne peuvent s’appliquer en l’espèce dès lors que les menaces du salarié de faire grève ne se sont jamais concrétisées.
La protection de l'exercice du droit de grève ne se limite pas à une participation du salarié à la grève ni à une réalisation de celle-ci
Une argumentation rejetée par la Cour de cassation qui valide la solution dégagée par la cour d’appel. En s’appuyant sur l’article L. 2511-1 du code du travail, elle réitère sa position et rappelle que la nullité du licenciement d’un salarié ne se limite pas au cas où le licenciement est prononcé à l’occasion d’une participation effective du salarié à une grève. Cette nullité « s’étend à tout licenciement prononcé à raison d’un fait commis au cours ou à l’occasion de l’exercice d’un droit de grève et qui ne peut être qualifié de faute lourde ».
Autrement dit, il importe peu que le salarié soit gréviste ou que le mouvement social se déclenche. En s'appuyant sur les constatations des juges du fond, dont il ressort que le licenciement était motivé par la menace du salarié de faire grève dans un contexte de revendication collective, elle considère que les faits reprochés au salarié avaient bien été commis à l'occasion de l'exercice du droit de grève. C'est donc à bon droit que le licenciement prononcé pour faute grave doit être annulé.