L’employeur qui envisage de licencier pour motif économique un salarié en CDI doit lui proposer un contrat de sécurisation professionnelle (CSP) dont le but est de lui permettre de retrouver rapidement un emploi. Outre l’obligation de lui indiquer la cause économique de la rupture, l’employeur doit également l’informer qu’il dispose d’une priorité de réembauche, d'une durée d'un an à compter de la date de rupture du contrat de travail s’il en fait la demande au cours de ce même délai (C. trav., art. L. 1233-45). C’est sur ce dernier point que la Cour de cassation se prononce dans un arrêt du 26 février 2025 publié au bulletin.
L'information sur la priorité de réembauche délivrée après l'adhésion de la salariée au CSP, est tardive
Dans le cadre d’un licenciement pour motif économique, une pharmacienne assistante est convoquée à un entretien préalable fixé au 22 juin, au cours duquel lui sont remis un dossier relatif au CSP et un document d’information sur les motifs économiques de la rupture envisagée. Après réflexion, elle adhère au dispositif le 11 juillet. Le même jour, son employeur lui adresse un courrier recommandé intitulé « Rupture d’un commun accord suite à adhésion au CSP » l’informant de la priorité de réembauche dont elle bénéficie. Contestant la légitimité de son licenciement, elle saisit la juridiction prud’homale. La procédure suit son cours et l’affaire est portée devant la cour d’appel qui considère le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif que la salariée n’avait pas été informée de sa priorité de réembauche avant d’avoir accepté le dispositif.
L’employeur se pourvoit en cassation et obtient gain de cause. La Cour de cassation se prononce au visa des articles L. 1233-45 du code du travail, énonçant la priorité de réembauche dont bénéficie tout salarié licencié pour motif économique et ses conditions de mise en œuvre, et L. 1233-16 du même code, précisant que cette priorité de réembauche doit être mentionnée dans la lettre de licenciement justifiant les motifs économiques. En se basant sur ces textes, elle rappelle que « lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'un contrat de sécurisation professionnelle, la priorité de réembauche dont il bénéficie doit être mentionnée dans le document écrit énonçant le motif économique de la rupture du contrat de travail, et donc être portée à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation ».
Remarque
Cette solution ne change pas de cap. Elle conserve la ligne jurisprudentielle afférente à la convention de reclassement personnalisé (CRP) et étendue au CSP. Lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l’acceptation par le salarié d’un CRP/CSP, l’employeur doit en énoncer le motif économique et mentionner le bénéfice de la priorité de réembauche :
- soit dans le document écrit d'information sur ce dispositif remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement ;
- soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement imposé par le code du travail ;
- soit encore, lorsqu'il n'est pas possible à l'employeur d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par le salarié du contrat de sécurisation professionnelle, dans tout autre document écrit, porté à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation (Cass. soc., 30 nov. 2011, n° 10-21.678 ; Cass soc. 22 sept. 2015 n° 14-16.218).
Dans la présente affaire, le document d’information sur les motifs économiques de la rupture envisagée communiqué par l’employeur lors de l’entretien préalable ne comportait pas d’information sur la priorité de réembauche. Cette information délivrée à la salariée postérieurement à son acceptation au CSP, dans un courrier recommandé à part, est donc tardive.
L'information tardive de la priorité de réembauche ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse
Elle rappelle également que le défaut d’information de cette priorité de réembauche, au salarié qui adhère à un contrat de sécurisation professionnelle, ne prive pas la rupture du contrat de cause réelle et sérieuse mais permet seulement au salarié qui justifie d’un préjudice d’obtenir des dommages-intérêts. Ce préjudice n’est pas automatique. En cas d’absence ou d’information tardive sur la priorité de réembauche, le salarié doit alors démontrer l’existence d’un préjudice distinct de celui qui résulte du licenciement lui-même (Cass. soc., 30 janv. 2019, n° 17-27.796). Seul le défaut d’information du motif économique prive la rupture de cause réelle et sérieuse. En conséquence, l’arrêt de la cour d’appel et cassé et l’affaire est renvoyée devant une autre cour d’appel.