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8 décembre 2022
Le non respect de la procédure de constat d'inaptitude par le médecin du travail ne suffit pas à remettre en cause l'avis d'inaptitude.

Lorsqu’un médecin du travail a émis un avis d’inaptitude, le salarié ou l'employeur peuvent contester cet avis en saisissant  le conseil de prud'hommes  dans un délai de 15 jours, selon la  procédure accélérée au fond ( en la forme des référés au moment des faits) (C. trav., art. L. 4624-7 et R. 4624-45).

Remarque

dès lors que l'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail mentionne les voies et délais de recours et n'a fait l'objet d'aucune contestation dans le délai de 15 jours, la régularité de l'avis ne peut plus être contestée et cet avis s'impose aux parties comme au juge, que la contestation concerne les éléments purement médicaux ou l'étude de poste (Cass. soc., 7 déc. 2022, n°21-23.662).

Le juge peut examiner les éléments de toute nature sur lesquels le médecin du travail s'est fondé pour rendre son avis. Il substitue à cet avis sa propre décision après avoir, le cas échéant, ordonné une mesure d'instruction notamment auprès d’un médecin inspecteur du travail pour l’éclairer sur les questions de fait.

En l’espèce, à l'issue d’une visite de reprise d’un salarié le médecin du travail a  émis un avis d’inaptitude indiquant : « Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé. L'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

Dix jours après, l'employeur saisit  le conseil de prud'hommes , statuant en la forme des référés (procédure applicable au moment des faits), aux fins de contester l'avis d'inaptitude et demander l'organisation d'une expertise.

Les juges du fond, s’appuyant sur l’expertise du médecin inspecteur régional du travail qu’ils avaient désigné , confirment l’inaptitude du salarié.

L’employeur conteste les avis d’inaptitude au motif que la procédure de constat d’inaptitude suivie par le médecin du travail et le médecin inspecteur régional  du travail n’avait pas été respectée car les avis d’inaptitude n’ont  été précédés d'aucune étude de poste, ni d'aucune étude des conditions de travail au sein de l'établissement comme l’exigent les articles L. 4624-4 et R. 4624-42 du code du travail.

Remarque

selon ces articles, le médecin du travail ne peut déclarer un salarié inapte à son poste de travail qu'après avoir réalisé un ou plusieurs examens médicaux, procédé ou fait procéder  à une étude de poste et des conditions de travail et après avoir échangé avec le salarié et l'employeur.

Il forme un pourvoi qui est rejeté par la Cour de cassation.

La Cour de cassation constate que la cour d'appel a procédé à l'examen de la procédure suivie par le médecin du travail et a relevé que l'inaptitude de l'intéressé ne résultait pas des conditions de travail mais d'une dégradation des relations entre les parties pendant l'arrêt de travail et des conséquences psychiques qui en sont résultées. Elle pouvait, par conséquent, en déduire  que l'absence d'études récentes était sans influence sur les conclusions du médecin du travail qui concernaient une période postérieure à l'arrêt de travail.

Les juges du fond pouvaient donc décider que le salarié était inapte à son poste ainsi qu'à tout autre poste au sein de l’entreprise.

Cette décision reprend  la solution dégagée par l’avis de la chambre sociale du 17 mars 2021 (Cass. Soc., 17 mars 2021, n°21-70.002) . Dans la lettre de la chambre sociale n°9 de mars-avril 2021, il était précisé que dans cet avis, la Cour de cassation « n’exclut pas tout examen de la procédure suivie par le médecin du travail ; mais elle considère que cette question s’insère dans l’appréciation, par le juge saisi d’une contestation sur l’avis lui-même, des éléments ayant conduit le médecin du travail à conclure à l’inaptitude du salarié : et c’est sur cette question de fond, l’aptitude du salarié à occuper son poste de travail, que le juge saisi de la contestation en application de l’article L. 4624-7 du code du travail devra se prononcer, sa décision se substituant sur ce point à celle du médecin du travail ».

On peut en conclure que le non-respect de la procédure du constat de l’inaptitude par le médecin du travail prévue par l’article R. 4624-42 du code du travail ne suffit pas à remettre en cause l’avis d’inaptitude mais que c’est un élément pris en compte par les juges du fond, en cas de contestation, pour ordonner, le cas échéant, une mesure d’instruction afin de vérifier si l’avis d’inaptitude du salarié à son poste prend en compte notamment les conditions de travail.

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Nathalie LEBRETON
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